mardi 1 août 2017

COLETTE ET LE DROIT DU MACAQUE

On touche le fond…


Reprenons. Un photographe animalier bosse sur une population de macaques indonésiens. Il les accoutume, leur file ses appareils et l’un des macaques fait un autoportrait dont les réseaux sociaux s’emparent. C’est vrai que c’est une photo sympa. Là, où c’est moins sympa, c’est quand la photo est pillée et publiée et que le mec touche pas une thune au motif qu’il n’est pas l’auteur de la photo. Celui qui a appuyé sur le bouton, c’est le singe et donc l’auteur, c’est le singe. C’est lui qu’on doit payer….

Déjà, là, on est en plein délire. Le photographe est quand même celui qui a rendu la photo possible. Filer un droit d’auteur qui est un droit de propriété intellectuelle, c’est à dire un droit patrimonial à un macaque, faut oser. Ils ont osé…..Et ils ont gagné…..

Et donc, moi, je me tourne vers ma copine Colette. Colette, tu es juriste. Tu es tellement juriste que tu es intervenue pour faire voter une loi qui accorde aux macaques un droit à la sensibilité. Est ce que tu t’es rendue compte que tu ouvrais une porte ? Parce que ton droit à la sensibilité, il va pas tarder à devenir un droit à la créativité. Voire un droit à l’image. Qu’on pourra conduire dans les prétoires un photographe taurin dont les images auront choqué la sensibilité d’un Miura, de surcroit privé du droit sur son image ?

Je déconne ? Non. Le macaque ci-dessus, il a trouvé des défenseurs. De vrais, beaux, purs défenseurs. Qui vont en justice pour défendre ses droits. Et qui, affirmant qu’ils le représentent, demandent à toucher ses droits. Beaux et purs jusqu’au portefeuille inclus. Le propriétaire de l’appareil et de la péloche, il a tout perdu. Une association de connards décérébrés qui n’ont jamais rien su faire l’ont dépouillé.

Alors, imaginons. Imaginons un procès intenté par des collectivistes anticorridas au nom de la sensibilité des bovins ibériques. En s’appuyant sur le précédent du macaque, ils vont réclamer des sous pour compenser une sensibilité violée. Tu vas l’avoir ta notoriété Colette. Pas exactement comme tu prévoyais… Parce que tu as cru à la sincérité des protecteurs des animaux et que tu as refusé de voir que leur fonctionnement est un fonctionnement purement marketing pour récupérer des adhérents, des cotisations, des aides, des legs, bref du fric et du poids médiatique ou des électeurs. En enlevant les animaux de la catégorie des meubles, tu as ouvert la boîte de Pandore, espérant gratter quelques voix pour assurer ta réélection. Tu es assez jeune pour contempler le résultat de ton action. A moins que tu n’aies prévu de devenir l’avocate spécialisée de la sensibilité animale, une sorte de Collard du poulet en batterie.

Voici quelques années, le droit à l’image était lié à la propriété du support. Les grandes agences fournissaient leurs photographes en pellicules. Propriétaires du support, elles étaient de facto propriétaires de l’image. C’était trop simple mais surtout l’investissement modeste ne faisait pas le poids face aux sommes payées par les médias. Les photographes se sentaient lésés et ils l’étaient. Mais ils étaient aussi mieux protégés. A vouloir se protéger juridiquement, on s’affaiblit. Nous avons accepté que tout un chacun se croit photographe, nous arrivons au bout : un macaque a droit à la propriété intellectuelle, notion pervertie et qu’il faudra bien un jour discuter. Si un macaque y a droit, un enfant de trois ans aussi. Lors du divorce, c’est papa ou maman qui va gérer les droits ?

Dans propriété intellectuelle, le syntagme important, c’est « intellectuel » qui suppose une formation, une réflexion, une préparation, une expérience. Mais c’est « propriété » qui assure le fric. Ce n’est pas nouveau. Déjà des dizaines d’éditeurs ont eu à lutter contre des ayants-droit ou des veuves abusives contrôlant une œuvre à laquelle ils n’avaient aucune part pour s’assurer des revenus.

J’ai décidé de ne plus photographier les chats de mes enfants. Ces saloperies qui chient dans le jardin, qui collent des poils partout et qui ruinent le budget en croquettes hors de prix, pourraient me demander un droit à l’image. Si pas eux, leurs ayants-droit, surtout auto-proclamés. Les fabricants de calendriers publicitaires devraient se méfier. Entre les chatons sur coussins brodés et le regard humide de bovidés au pacage, leur budget risque d’exploser. Depuis le temps qu’ils  exploitent leur sensibilité. Ou la nôtre.


On en reparlera….

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